Découverte d’une espèce nouvelle d’animal massif dans les schistes de Burgess datant d’il y a un demi-milliard d’années

Les paléontologues du ROM mettent au jour un des plus gros radiodontes de l’explosion cambrienne

Reconstitution de Titanokorys gainesi. Illustration de Lars Fields © Musée royal de l'Ontario.

TORONTO, le 8 septembre 2021 – Les paléontologues du Musée royal de l’Ontario (ROM) ont découvert les restes fossilisés d’une immense espèce nouvelle appartenant à un groupe aujourd’hui disparu du règne animal, dans les roches du Cambrien datant d’un demi-milliard d’années. Cette découverte dans le parc national Kootenay, au cœur des Rocheuses canadiennes, a été annoncée le 8 septembre 2021 dans une étude publiée dans la revue Royal Society Open Science.

Nommée Titanokorys gainesi, la nouvelle espèce se démarque par sa taille. Avec ses cinquante centimètres de long, estime-t-on, Titanokorys faisait figure de géant parmi les animaux marins de l’époque. En effet, la plupart n’étaient guère plus grands qu’un auriculaire.

« La taille incroyable de cet animal défie l’entendement. Il s’agit d’un des plus gros animaux datant du Cambrien jamais découvert », affirme Jean-Bernard Caron, conservateur Richard M. Ivey de paléontologie des invertébrés au ROM.

Sur le plan de l’évolution, Titanokorys fait partie d’un groupe d’arthropodes primitifs appelé « radiodontes », dont le célèbre représentant est Anomalocaris, un prédateur au corps fuselé pouvant atteindre un mètre de long. Comme les autres radiodontes, Titanokorys possédait des yeux composés, une bouche rappelant des tranches d’ananas et hérissée de dents, une paire de pinces épineuses sous la tête pour saisir ses proies et plusieurs palettes natatoires, le long du corps. Quelques espèces du groupe avaient un bouclier céphalique très apparent, le plus grand étant, d’après nos connaissances, celui de Titanokorys.

« Titanokorys fait partie des ‘hurdiidés’, un sous-groupe de radiodontes, caractérisés par une tête extrêmement longue, recouverte d’un bouclier en trois parties qui pouvait prendre toute une variété de formes. La tête est si grande, comparativement au corps, qu’on a l’impression de voir une tête nageante », ajoute Joe Moysiuk, co-auteur de l’article et doctorant en écologie et biologie évolutive à l’Université de Toronto. Il poursuit ses études au ROM.

On ignore pourquoi certains radiodontes ont acquis, au cours de l’évolution, une telle variété de formes et de tailles de boucliers céphaliques. Sans doute divers facteurs sont-ils en cause. La grosse carapace aplatie de Titanokorys laisse toutefois croire que l’espèce s’était adaptée à la vie sur les fonds marins.

« Ces énigmatiques animaux ont sans aucun doute eu un profond impact sur les écosystèmes du plancher marin au Cambrien. Tels de multiples peignes, leurs pattes portaient à la bouche, avec une formidable efficacité, les proies qu’elles capturaient avec leurs minuscules épines. L’énorme carapace dorsale leur permettait peut-être de creuser dans la boue », explique M. Caron, également professeur agrégé d’écologie et de biologie évolutive à l’Université de Toronto, et directeur de thèse de M. Moysiuk.

Les fossiles mentionnés dans l’étude ont tous été recueillis près du canyon Marble, dans le nord du parc national Kootenay, lors d’expéditions successives du ROM. Découverte il y a moins de dix ans, ce secteur a révélé un foisonnement d’animaux du Cambrien dans les schistes de Burgess, y compris une espèce plus abondante, proche du Titanokorys, appelée Cambroraster falcatus car son bouclier céphalique rappelle le Millennium Falcon. Selon les auteurs, ces deux espèces en compétition se nourrissaient des mêmes organismes benthiques.

Les sites fossilifères des schistes de Burgess se trouvent dans les parcs nationaux Yoho et Kootenay, et sont administrés par Parcs Canada. L’organisme est fier d’aider des scientifiques de renom à enrichir nos connaissances sur cette période déterminante de l’histoire de la Terre. Il est également heureux de faire connaître ces endroits au reste de la planète grâce à des randonnées guidées qui ont remporté plusieurs prix. En 1980, l’UNESCO a inscrit les schistes de Burgess au patrimoine mondial en raison de leur valeur exceptionnelle pour l’humanité. Ils font désormais partie du site mondial des Parcs des montagnes Rocheuses canadiennes.

La découverte de Titanokorys gainesi a été mentionnée dans l’épisode « First Animals » de la série The Nature of Things, sur la chaîne anglaise de Radio-Canada. Ces spécimens et bien d’autres, issus des schistes de Burgess eux aussi, seront présentés dans la nouvelle Galerie Willner Madge de l’aube de la vie, une galerie du ROM qui sera inaugurée en décembre 2021.

Ces recherches et les expéditions bénéficient d’un important soutien financier de la famille Polk Milstein, du ROM, de la National Geographic Society (subvention 9475-14 accordée à Jean-Bernard Caron), du Conseil de recherches de Suède (bourse octroyée à Michael Streng), de la National Science Foundation (subventions NSF-EAR-1556226, 1554897) et du Pomona College (bourse accordée à Robert R. Gaines). Les travaux reçoivent aussi une aide financière du Conseil de recherche en sciences naturelles et en génie (CRSNG) sous la forme d’une subvention à la découverte décernée à Jean-Bernard Caron, ainsi que d’une bourse d’études supérieures du Canada Vanier accordée à Joy Moysiuk par l’Université de Toronto (département d’écologie et de biologie évolutive).

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Caron J-B, Moysiuk J. 2021. “A giant nektobenthic radiodont from the Burgess Shale and the significance of hurdiid carapace diversity,” dans Royal Society Open Science.

DOI: https://doi.org/10.1098/rsos.210664

 

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